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Preuve du préjudice : manquements de l’employeur en matière de santé et sécurité du salarié ouvrant droit à réparation

Publié le : 05/11/2024 05 novembre nov. 11 2024

Le concept de préjudice nécessaire semblait abandonné depuis 2016, date à laquelle la Cour de cassation a jugé que pour obtenir réparation, le salarié devait prouver l’existence et l’étendue de son préjudice (Cass. soc., 13 avr. 2016, nº 14-28.293). Or, la chambre sociale de la Cour de cassation a rendu une série d’arrêts le 4 septembre 2024 dans lesquels elle juge que le seul constat de manquement de l’employeur dans certains domaines ouvre droit à réparation. Ces manquements concernent des atteintes à la santé ou à la sécurité d’un salarié.  
 
Dans un premier arrêt, elle juge que le seul constat du non-respect du temps de pause quotidien ouvre droit à réparation. Peu importe, comme l’avaient relevé les juges du fond dont l’arrêt est censuré, que le salarié ne s’en soit jamais plaint tout au long de la relation contractuelle et que toutes les heures réalisées aient été payées.
Dans cette affaire, il était également reproché à l’employeur d’avoir fait venir le salarié trois fois pendant son arrêt maladie pour accomplir ponctuellement et sur une durée limitée une tâche professionnelle. La chambre sociale de la Cour de cassation, en mentionnant les articles 5 et 6 de la directive 89/391 du 12 juin 1989 « concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail » considère que, « lorsqu’il confie des tâches à un travailleur, l’employeur doit prendre en considération les capacités de ce travailleur en matière de sécurité et de santé ». En conséquence, elle affirme que « le seul constat du manquement de l’employeur en ce qu’il a fait travailler un salarié pendant son arrêt de travail pour maladie ouvre droit à réparation » (1e espèce).
 
Dans une 2e affaire, la Cour de cassation a refusé en revanche d’admettre un nouveau cas de "préjudice nécessaire" en cas de carence de l’employeur dans l’organisation des visites médicales.
En l’espèce, il était reproché à l’employeur une absence de suivi médical ou de visite de reprise au retour du congé maternité. Pour la Cour de cassation, les dispositions de la directive 92/85 du 19 octobre 1992 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail ne confèrent pas au salarié de droits subjectifs, clairs, précis et inconditionnels en matière de suivi médical. Il appartient alors au salarié, en cas de non-respect par l’employeur des prescriptions nationales en la matière, de démontrer l’existence d’un préjudice.
En revanche, elle fait droit à la demande de la salariée qui a travaillé durant le congé de maternité. Selon la Cour de cassation, "le seul constat" du manquement de l’employeur à son obligation de suspendre toute prestation de travail durant le congé de maternité "ouvrait droit à réparation" (2e espèce).
 
Dans la 3e affaire, il s’agissait de savoir si le fait pour l’employeur de ne pas avoir organisé de visite de reprise dès la décision de classement en invalidité de deuxième catégorie ouvre droit en soi à réparation ou si le salarié doit justifier dans ce cas d’un préjudice né du retard dans la constatation de son inaptitude. Une nouvelle fois, la Cour de cassation, se fonde sur les dispositions de l’article 14 de la directive 89/39 du 12 juin 1989 concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail qui ne confèrent pas au salarié de droits subjectifs, clairs, précis et inconditionnels en matière de suivi médical. Elle en déduit donc qu’il appartient au salarié, en cas de non-respect par l’employeur des prescriptions nationales en la matière, de démontrer l’existence d’un préjudice (3e espèce).
1e espèce : Cass. soc. 4 septembre 2024, n° 23-15.944 FS-B
2e espèce : Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 22-16.129 FS-B
3e espèce : Cass. soc., 4 septembre 2024, n° 22-23.648 FS-B

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