Expertise pour risque grave : l'expert peut auditionner les salariés sans demander l'autorisation de l'employeur
Publié le :
13/08/2024
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En l'espèce, le CHSCT d'un hôpital avait décidé de recourir à une expertise pour risque grave sur le fondement de l’ancien article L 4614-12, 1° du Code du travail et avait désigné un cabinet d’expertise à cette fin.
Selon le Code du travail, l'employeur ne peut s'opposer à l'entrée de l'expert dans l'établissement. Il lui fournit les informations nécessaires à l'exercice de sa mission.
Aux termes de l'article L. 4612-3 du même code, applicable à l'époque des faits, le CHSCT contribue à la promotion de la prévention des risques professionnels dans l'établissement et suscite toute initiative qu'il estime utile dans cette perspective. Il peut proposer notamment des actions de prévention du harcèlement moral, du harcèlement sexuel et des agissements sexistes. Il en résulte, pour la Cour de cassation, que l'expert désigné dans le cadre d'une expertise pour risque grave, s'il considère que l'audition de certains salariés de l'entreprise est utile à l'accomplissement de sa mission, peut y procéder à la condition d'obtenir l'accord des salariés concernés. En cas de contestation par l'employeur, il appartient au juge d'apprécier la nécessité des auditions prévues par l'expert au regard de la mission de celui-ci.
Le président du tribunal judiciaire ayant relevé que l'expertise ordonnée à la suite du constat de l'existence d'un risque grave pour l'ensemble des agents de la direction des ressources humaines de l'Hôpital qui se traduisait par des risques psycho-sociaux et physiques et par la manifestation d'une souffrance au travail mise en évidence par de multiples faits, sans que les alertes préalables y aient mis un terme, imposait que l'ensemble de la chaîne hiérarchique et organisationnelle, tous les intervenants en matière de santé au travail, les représentants du personnel et délégués syndicaux, de même que chacun des agents de la direction concernée, y compris les six agents ayant récemment quitté ces services, puissent être entendus avec leur accord.
Sur la question des documents sollicités par l'expert, l’employeur faisait valoir que les demandes de l’expert en l'occurrence allaient au-delà des éléments nécessaires à l’exercice de sa mission puisqu’il exigeait, outre les documents relatifs au service des ressources humaines objet de l’expertise, des documents intéressant tout l’hôpital. La Cour de cassation a précisé qu'en cas de litige, il appartient au juge d'apprécier la nécessité des informations réclamées par l'expert pour accomplir sa mission. Elle approuve le président du TJ d’avoir jugé que, mandaté pour un risque grave concernant le service des ressources humaines, l’expert devait nécessairement prendre connaissance et analyser les documents intéressant ce service mais aussi des documents intéressant tout l’hôpital, notamment l’organigramme pour situer cette équipe au sein de l’établissement en raison de ses interactions constantes avec les autres services, les PV de CHSCT pour identifier les difficultés éventuellement déjà soulignées et les autres documents généraux concernant tous les agents, parmi lesquels, donc, ceux du service RH.
Cass. soc. 10 juillet 2024, n°22-21.082 FS-B
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